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Lettre du Japon PDF Imprimer Envoyer
Mardi, 19 Janvier 2010 12:54
LETTRE DU JAPON
Nouvelles d'un pratiquant et professeur d'Aikido,
en direct du Soleil Levant!
 
 
La symbolique du Hakama
 
J'ai eu le plaisir de recevoir ce matin une grande enveloppe blanche, toute repliée et scotchée, qui contenait, outre une serviette en coton imprimée aux couleurs de la "47ème Démonstration Nationale de l'Aïkikaï", une charmante lettre d'un vieil ami qui a près de cinquante années de pratique derrière lui. Cet homme simple et chaleureux, presque mignon dans sa façon d'être, Kazuo MASAKI, est professeur titulaire d'Aikido au sein de la prestigieuse chaîne de télévision culturelle NHK, où il a fait une brillante carrière professionnelle avant de prendre une retraite bien méritée tout en continuant à tenir les rênes du Dojo interne.
 
Les circonstances de notre rencontre: en 1997, alors que je travaillais dans une entreprise de tourisme pour gagner mes écus, je fus dépêché jusqu'à un hôtel situé Porte de Montreuil, informé à 13h par l'agence que je devais y être pour... 13h15. En partant du centre de Paris, c'est pratique...
 
Pestant contre les voyageurs qui prenaient des hôtels situés en dehors des limites raisonnables de la Capitale, j'arrivais naturellement avec un bon quart d'heure de retard. Le couple de clients m'attendait, quelque peu irrité, et il fallut un certain temps pour briser la glace due aux circonstances de cette rencontre.
 
Comme nous terminions la visite, et que je m'apprêtais à prendre le chemin du retour, l'homme s'enquit de mon intérêt pour le Japon. "Ah, lui dis-je, c'est déjà une longue histoire..." "Mais encore?" "Bah, disons que... Certes, au Japon, les arts martiaux n'ont pas spécialement bonne presse, mais je vous assure... l'Aïkidô, en l'occurence, est un art merveilleux, et je..."
 
Je fus interrompu dans mon propos par une vigoureuse tape sur l'épaule, suivie d'une main tendue que je saisis sans trop comprendre.
 
M. MASAKI était un 6ème Dan de l'Aikikai, et nous passâmes en revue tous les Sensei et personnages de cette institution, à commencer par le plus illustre d'entre eux, Kisshômaru UESHIBA, que je connaissais moi-même pour avoir suivi assidûment ses cours pendant quatre années, avant de recommencer mon apprentissage chez Maître SHIMIZU.
 
Du coup, les embouteillages du retour étaient du pain béni; l'on conversait à bâtons rompus sur les multiples mérites de notre Art, et c'est la mort dans l'âme que nous nous séparions à l'hôtel, non sans avoir échangé nos adresses bien entendu.
 
Il s'ensuivit une visite de M. MASAKI au Tendôkan, notre rencontre en ayant été l'élément déclencheur; sans avoir connu un succès à la hauteur de sa qualité, le livre de Maître SHIMIZU "Zen et Aïkidô" (mon ouvrage-fétiche depuis 1984) est cependant très réputé au moins chez les passionnés de tous styles et chez les érudits qui, sans forcément pratiquer, sont versés dans l'étude des relations entre le Budô et le Bouddhisme.
 
M. MASAKI avait bien entendu lu l'ouvrage, et souhaitait depuis rendre au moins une fois visite au Dôjô de Maître SHIMIZU.
 
Le Sensei l'apprécia d'emblée, et, fait très rare, le prit en véritable amitié, au point que depuis lors, ils se voient de temps à autre pour dîner et engloutir quelques verres de Saké, ce qui a pour effet dans le contexte japonais d'éliminer les barrières et de faciliter la communication, sans toutefois tomber dans les familiarités.
 
Je fus une fois convié à l'un de ces dîners; nous passâmes tous les trois un moment assez inoubliable, bien que, respectueux des us et coutûmes, en tant que "jeune pratiquant", mon rôle se bornât ce jour-là à écouter attentivement les propos de mes deux illustres hôtes. M. MASAKI, "entre la poire et le fromage" comme nous dirions joliment chez nous, entreprit de m'éduquer sur la symbolique du hakama. Maître SHIMIZU l'écoutait poliment exposer, croquis sur un porte-baguettes en papier à l'appui (je garde, peut-être pas religieusement, mais en tout cas en en prenant soin, ce souvenir éphémère de cette soirée), les principes que voici.
 
"La partie qui se trouve au dos du Hakama, le "Koshi-Ita" ou "planchette du bassin", maintient bien le dos et les hanches, en assurant une position droite, la colonne vertébrale bien étirée. Cela nous rappelle qu'il faut avoir le ventre dirigé vers l'avant, et symboliquement qu'il convient de vivre en allant de l'avant.
 
De dos, le Hakama comporte deux plis: gauche et droit, correspondant respectivement au principe du JIN (que je traduis par Amour universel, avec une notion de compassion réelle pour tout ce qui vit) et AI (Amour du prochain).
 
De face, le Hakama comporte cinq plis, qui symbolisent cinq principes essentiels:
BU, la martialité, dans son acception la plus noble (détachée du désir de vaincre et même de combattre);
YÛ, le Courage authentique: courage de vivre sans compromis et sans se compromettre, en restant imperturbablement DROIT dans l'existence;
GI, l'étiquette et le respect qu'elle implique; respect d'un ordre social juste, d'un ordre familial équilibré que l'adepte prendra à coeur de transmettre à sa descendance;
NIN, la Noblesse du coeur, en l'occurence la capacité d'endurer les épreuves sans fléchir; 
JÔ, la Pureté du sentiment associée à la force du coeur, qui doit primer sur celle du corps. "
 
Une excellente façon de garder présents à l'esprits les fameux principes du Budô, inhérents à tous les Arts, martiaux ou non, qu'a enfantés le Japon, et que nous remémore si souvent Maître SHIMIZU: "Budô wa Rei de hajimari, Rei de owaru". Le Budô commence avec le respect de l'étiquette, et se termine pareillement.
 
 
Voici donc ci-après la traduction intégrale de la lettre reçue aujourd'hui. Elle mérite d'être rendue publique en ce sens que l'on y retrouve certaines belles choses qu'il fait bon se remémorer régulièrement. 
 
Cette carte est de ces courriers qu'il fait bon recevoir; de ces lettres que l'on relit plusieurs fois à la suite, que l'on range soigneusement, pour les ressortir aussitôt et les relire car elles vous mettent du baume au coeur et vous font envisager la Vie sous son aspect le plus engageant. De ces missives que l'on a envie de garder dans la poche intérieure de la veste, là pliées tout contre notre coeur, pour qu'elles nous accompagnent dans notre vie.
 
 
Fluidité & Spirale,
tel est l'intitulé que je suggère pour ce texte.
 
"Le 10 janvier 2010,
Cher Pascal,
Merci pour ta belle carte de voeux.
L'an qui s'est écoulé aura vu nos retrouvailles, très brèves certes, mais qui m'ont rempli de joie. A chaque fois que je te revois, j'ai le sentiment de retrouver un proche, comme un membre de ma famille, et cela me fait chaud au coeur.
 
Le fait que l'on se soit rencontrés à Paris il y a quelques années aura été pour nous un signe du destin, ne le crois-tu pas?
 
Cette année est l'année du Tigre, et étant moi-même de ce signe astrologique, je vais allègrement vers mes 72 ans. La seconde moitié de mon existence, c'est-à-dire les 40 dernières années, ont été rendues magiques grâce à l'Aikidô.
 
Je continue à enseigner l'Aïkidô sur mon ancien lieu de travail, la NHK, en insistant ces derniers temps sur la logique du Cercle dans le déplacement. Il ne s'agit pas en effet d'appliquer les mouvements avec force, mais d'une manière plus souple et plus fluide: c'est ce que j'enseigne. Comme les bambous dans la brise: un mouvement souple et adapté, et sans jamais casser, car animé par la Vie.
 
Ces principes s'appliquent non seulement aux techniques martiales (Bujutsu), mais également dans les relations au quotidien entre les personnes.
 
En pratiquant de manière plus souple et plus fluide, l'on parvient à un mouvement qui gagne en naturel, en spontanéité, et qui est de plus très esthétique.
 
Dans notre section, il y a en effet pas mal de femmes et de gens âgés; par conséquent nous travaillons en visant pour objectif, non pas la pratique en force, mais la Beauté exprimée par l'Aïkidô.
 
Le mouvement naturel et la Beauté sont des principes également présents dans la Cérémonie du Thé. Depuis quelques années, dans notre Dôjô de la NHK, il arrive que nous fassions une petite Cérémonie du Thé après l'entraînement, juste entre nous. Le principe étant, là encore, de se mouvoir avec naturel et en exprimant toute notre attention bienveillante envers le partenaire. Une façon de pratiquer l'absence du soi (ego) et de ne faire plus qu'un avec la Nature.
 
Si l'Aïkidô est le Zen en mouvement, alors on peut dire, je crois, que la Cérémonie du Thé (Sa-Dô) est le Zen dans le Calme.
 
J'espère avoir l'occasion de t'y convier une prochaine fois,
Mon Cher Ami Pascal.
Bien à toi,
Kazuo MASAKI. "

 

 

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